Décarbonation : course contre la montre

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En ce début d’année 2024, je souhaite partager quelques idées simples mais factuelles issues des rencontres d’industriels et énergéticiens fin 2023.

Le sentiment général est que la décarbonation est une course contre la montre. Dans le secteur du bâtiment, tous les industriels ou acteurs majeurs sont focalisés sur la construction durable : dans le neuf c’est la construction légère qui permet de diviser par deux le poids carbone des matériaux tout en développant l’économie circulaire. Par ailleurs, rénover le bâti existant pourrait diviser par cinq la consommation énergétique. En France le bâtiment représente 44% de l’énergie consommée, c’est plus que le parc nucléaire fonctionnant à plein régime !

Nous ressentons tous dans le monde du bâtiment qu’il y a un besoin gigantesque d’énergie décarbonée et nous sommes loin d’être au niveau, d’où ce sentiment de « course contre la montre ». Alors que le bâtiment est un réservoir colossal d’économie d’énergie…

Dans le secteur du bâtiment, l’extraction des matières premières, la fabrication et le transport représentent 12% des émissions (bâtiment 40% des émissions de CO2). Tout le reste est lié à l’usage des bâtiments. En France, nous pourrions économiser sept tranches nucléaires en réduisant de 10% la consommation énergétique des bâtiments sachant qu’il y a près de 5 millions de passoirs thermiques. La hausse du budget de « MaPrimRenov » est déjà un signe positif.

On peut également évoquer des solutions comme les pompes à chaleur pour l’économie d’énergie, or, elles fonctionnent sur le différentiel de température et donc avec des bâtiments pas assez suffisamment isolés, elles ne marcheront pas… Au contraire, cela va tirer fortement sur la consommation électrique et n’apportera pas le confort attendu.

Priorité doit donc être donnée à isoler l’enveloppe ! L’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 s’appuie notamment sur l’électrification des infrastructures et des usages et va générer une hausse considérable de la consommation électrique. Au-delà des enjeux d’optimisation énergétique, comme évoqué précédemment, et d’ajustement de production, il est urgent de penser à des systèmes de stockage de l’énergie non consommée tant au niveau de réseaux qu’au niveau domestique. Le développement des marchés de la mobilité électrique et des énergies renouvelables offre des opportunités pour le stockage de l’énergie, qui sera un enjeu majeur entre 2030 et 2050. De nouveaux concepts techniques et économiques émergent et de nombreux secteurs industriels planchent sur le sujet…

Enfin une mobilisation massive sur l’économie circulaire est nécessaire ; beaucoup de matériaux de base comme la laine de verre, plaque de plâtre, verre plat contiennent déjà une part non négligeable de « recyclé ». Pour monter en puissance, la difficulté se situe davantage dans les filières de collecte et de recyclage que dans la formulation des matériaux.

Dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs (REP), les industriels investissent dans la récupération des déchets de chantiers, à travers des sociétés spécialisées dans la distribution par exemple.

Bien sûr il y a des coûts de tri mais en fin de compte, cela permet des économies d’énergie…

L’urgence est à la mobilisation de toute la filière pour atteindre des résultats significatifs dès la période 2025-2030. La rénovation énergétique est un enjeu essentiel pour le bien être à domicile comme au travail ; ne sous-estimons pas l’impact économique de cet enjeu sociétal.